Plus d’un million de signatures pour notre santé
Forte de l’engagement écrit de 140 ONGs de défense de l’environnement, de la santé ou des animaux, représentant au total plus de 1.124.000 personnes dans 11 pays européens, une délégation de scientifiques vient de remettre à la Commission européenne une lettre demandant l’application de la directive 86/609, notamment le point qui stipule, en matière d’expérimentation animale : « Les expériences ne doivent avoir lieu que s’il n’existe pas de méthode alternative n’impliquant pas l’utilisation des animaux. » Quand on sait que près de 18.000 Français décèdent chaque année suite aux effets secondaires de médicaments (1) pourtant testés sur des animaux, quand on sait qu’une même substance peut être déclarée cancérigène ou non cancérigène selon la lignée de souris sur laquelle on la teste, alors qu’il existe des méthodes alternatives fiables pour évaluer cette toxicité, on mesure les graves conséquences pour notre santé de la non application de cette directive.
Dans le cadre de REACH en novembre 2005, le Parlement européen a pris acte de l’existence de telles méthodes alternatives, avec une référence particulière à la toxicogénomique. Fondée sur la culture de cellules humaines et les puces à ADN, elle ne laisse rien dans l’ombre, contrairement aux tests sur les animaux, hérités du XIXe siècle et qualifiés de « mauvaise science » par l’un des responsables scientifiques mêmes de la Commission (2). Antidote Europe a développé une approche nouvelle de la toxicogénomique et a mis en évidence ses avantages : fiabilité tout d’abord, en ce qui concerne l’évaluation des risques toxiques pour les humains, mais aussi rapidité des tests et faible coût.
Pourtant, il a fallu 4 mois d’attente et plusieurs relances pour que la délégation (3) soit enfin reçue à la Commission, et encore, non par le cabinet du Président à qui la lettre était adressée et à qui il incombe de veiller au respect des directives, mais par un membre du cabinet du commissaire à l’Environnement, sans compétences en matière de Santé ni de Recherche. Les membres de la délégation lui ont rappelé que leur premier souci était la santé humaine, qui ne peut être garantie par les tests sur des animaux. Le sénateur Roland Gillet, secrétaire général de l’Union des parlementaires francophones, a insisté sur le rôle historique que la Commission pourrait jouer. Introduire des méthodes modernes dans les différentes réglementations sur l’évaluation de substances chimiques (y compris les médicaments) montrerait la détermination de la Commission à protéger la santé humaine tout en aidant l’industrie chimique et pharmaceutique à regagner la confiance des consommateurs et à faire preuve de responsabilité vis-à-vis de l’environnement. Une telle initiative répondrait aussi à la demande pressante d’une majorité des citoyens de l’Union européenne de renoncer aux tests sur des animaux.
Pour Antidote, les difficultés à obtenir le rendez-vous pour la remise des lettres et, de façon générale, les déclarations des institutions européennes sur le bien-être des animaux de laboratoire, montrent l’embarras de la Commission au sujet d’une question restée jusqu’à présent sans réponse : quelle serait la justification scientifique de l’utilisation d’animaux pour évaluer les risques toxiques pour les humains ? Pendant que nous attendons la réponse et alors que des méthodes fiables sont disponibles, notre santé et notre planète continuent à payer leur tribut aux lenteurs bureaucratiques.
La liste complète des signataires de la lettre remise le 10 juillet 2006 est disponible sur le site d’Antidote Europe, association à but non lucratif, créée par des chercheurs issus du CNRS et oeuvrant pour une approche préventive de la santé humaine.
(1) Le Monde, 13 novembre 1997, déclarations de M. Bernard Kouchner, alors secrétaire d’Etat à la Santé.
(2) Déclaration de M. Thomas Hartung, directeur du Centre européen pour la validation de méthodes alternatives (organisme sous tutelle de la Commission européenne), dans l’hebdomadaire scientifique Nature du 10 novembre 2005.
(3) composée de membres de 8 des associations signataires : Antidote Europe, ARPA/MHAN, Fondation 30 millions d’amis, Greenpeace Genève, SEA, UBAEAV, Veeweyde