M. Tony Blair veut-il retourner au Moyen Age ?
M. Tony Blair vient de signer une pétition pour soutenir l’expérimentation animale dans la recherche biomédicale. On peut s’étonner de ce soutien alors que six personnes volontaires pour un essai de médicament, à Londres, viennent de quitter l’hôpital où elles avaient été admises d’urgence en raison d’une réaction qui aurait pu être mortelle, réaction qui ne s’était produite sur aucun des animaux utilisés préalablement pour tester cette substance, lapins et singes ayant pourtant reçu une dose cent fois supérieure.
La date de la signature de M. Blair et la publicité qui en est faite sont-elles le fruit du hasard ? On serait en droit de se demander si, au contraire, elles ne seraient pas une sorte de contre-feu visant à protéger l’industrie pharmaceutique des retombées, sur son image, de l’essai raté de Londres. En tout cas, cette signature porte à croire que M. Blair n’est pas informé des découvertes scientifiques de la seconde moitié du XXe siècle, qui permettent de démontrer qu’aucune espèce animale n’est le modèle biologique d’une autre. Il ignore probablement que le séquençage du génome humain a fourni des mines d’informations et que nous disposons, au XXIe siècle, de méthodes non invasives nous permettant d’étudier l’être humain lui-même et à côté desquelles l’expérimentation animale fait figure de balbutiement moyenâgeux.
Il faut croire aussi que M. Blair ne craint pas de se mettre en porte-à-faux par rapport aux motions qui circulent au sein du Parlement britannique. En effet, 240 de ses membres ont déjà signé une motion (EDM92) demandant l’évaluation de la pertinence de l’expérimentation animale, en accord avec plus de 80% des médecins généralistes de ce pays, qui, d’après un sondage réalisé par Europeans for Medical Progress, pensent que cette pratique peut induire en erreur et réclament son évaluation par un organisme indépendant.
Antidote Europe est une association à but non lucratif, créée par des chercheurs issus du CNRS, ayant mis au point une approche nouvelle de la toxicogénomique pour évaluer de façon fiable, rapide et peu coûteuse la toxicité des substances chimiques (y compris les médicaments !) pour les humains. Trop fiable, peut-être ? Contrairement aux tests effectués sur des animaux et qui, par des résultats que l’on peut volontairement rendre contradictoires, peuvent absoudre des substances dangereuses (les six cobayes britanniques en témoigneront), la toxicogénomique en décèle tous les risques pour les humains. La cohérence appellerait donc au retrait du marché des substances dangereuses. Sujet sensible s’il en est, alors que se prépare le vote en deuxième lecture de REACH au Parlement européen. M. Blair (soutenu par MM. Chirac et Schroeder) avait déjà demandé que REACH ne nuise pas à la compétitivité de l’industrie chimique.
Alors, pétition pour que rien ne perturbe les essais de médicaments ou pour s’assurer que REACH soit bien un coup d’épée dans l’eau ? La grande perdante sera, dans tous les cas, la santé humaine !