Justice pour notre santé
Antidote Europe a déposé une plainte auprès du Médiateur européen.
Une plainte vient d‘être déposée auprès du Médiateur européen pour mauvaise administration de l’action européenne par la Commission (CE). Cette dernière a lancé un projet (“PL037712”), sur 5 ans et pour un coût de plus de 10 millions d’euros, pour développer une méthode d‘évaluation de la cancérogénicité des substances chimiques… méthode qui existe déjà !
Plus précisément, la méthode serait un “crible in vitro de carcinogénicité basé sur la génomique”, autrement dit des tests de “carcinogénomique”. Or, de tels tests se font couramment aux Etats-Unis et au Japon depuis une dizaine d’années ; ils ne sont que l’une des applications possibles de la “toxicogénomique”, méthode capable de mettre en évidence non seulement des effets cancérigènes mais aussi des effets neurotoxiques, perturbateurs endocriniens, etc. La CE ne pouvait ignorer que ces méthodes sont déjà d’utilisation courante et que des organismes officiels chargés de l‘évaluation des substances chimiques, tels la FDA (1) ou l’EMEA (2), encouragent la soumission de résultats de ces tests. Elle ne pouvait d’autant moins l’ignorer qu’Antidote Europe s‘était entretenue bien avant le lancement du projet PL037712 avec M. Thomas Hartung, directeur du Centre européen pour la validation des méthodes alternatives (CEVMA) et, à ce titre, conseiller scientifique de la CE.
Antidote Europe estime que, dans la mesure où la CE va vraisemblablement attendre la fin du projet PL037712, au moins cinq années seront perdues avant que ne soient mises en oeuvre de façon réglementaire et obligatoire ces méthodes véritablement scientifiques d‘évaluation des risques toxiques. En attendant, des tests continuent à se faire sur des animaux, tests qualifiés de “tout simplement de la mauvaise science” par M. Hartung. Avec l’entrée en vigueur du règlement REACH en juin 2007, ce sont donc des milliers de substances chimiques qui risquent d‘être autorisées sur la foi de tests ne présentant aucune fiabilité pour la santé humaine. En France, le cancer est devenu la première cause de mortalité. Une tendance qui ne pourra guère s’inverser tant que la “mauvaise science” continuera à être appliquée en lieu et place de la “toxicologie du XXIe siècle” (3) d’ores et déjà disponible et, de surcroît, bien moins coûteuse.
La plainte déposée par Antidote Europe a déjà reçu le soutien moral de 81 associations de 9 pays, représentant plus de 300.000 citoyens. Encore d’autres courriers de soutien ont été reçus depuis par Antidote Europe et seront transmis prochainement au Médiateur. Ces associations oeuvrent dans des domaines différents (santé, environnement, défense animale, etc.) et inscrivent donc ce soutien moral dans un tout autre cadre que le seul souci d‘épargner des animaux de laboratoire. Ce soutien montre bien la demande forte du public pour une réglementation qui protège efficacement notre santé et l’environnement. C‘était l’objectif de REACH ; il ne sera pas atteint tant que des substances chimiques ne subiront pas des tests fondés sur des critères véritablement scientifiques.
Antidote Europe est une association à but non lucratif, créée par des chercheurs issus du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et oeuvrant pour une meilleure prévention en matière de santé humaine.
(1) Food and Drug Administration, Etats-Unis
(2) Agence du médicament, Europe
(3) “Toxicologie du XXIe siècle : une vision et une stratégie” : un rapport de la National Academy of Sciences des Etats-Unis, qui encourage fortement la toxicogénomique et estime que “les systèmes cellulaires humains ont le potentiel pour largement supplanter les tests sur les animaux.”