De la recherche animale avec l’argent du Téléthon ?
Le Téléthon permet, chaque année, de recueillir des dons pour aider des malades mais aussi pour la recherche biomédicale. Cette recherche utilise-t-elle les meilleures méthodes disponibles ? Nous avons interrogé la présidente de l’AFM-Téléthon.
Le premier week-end de décembre aura lieu, comme chaque année, le Téléthon, immense événement médiatique pour collecter des dons au profit de l’AFM-Téléthon, une association dont le conseil d’administration est composé de malades et parents de malades (http://www.afm-telethon.fr/). Si le but de venir en aide à ces malades, à leurs familles, et de soutenir la recherche de thérapies est louable, nous nous interrogeons sur les méthodes utilisées pour mener à bien ces recherches, sur des maladies neuromusculaires principalement.
Quel que soit le domaine de la recherche biomédicale, des expériences continuent à être faites sur des animaux bien que, comme le démontrent Antidote Europe et de plus en plus de chercheurs dans le monde, la transposition à l’homme des résultats obtenus sur des animaux soit des plus hasardeuses. Beaucoup de scientifiques s’interrogent sur le bien-fondé de financer la recherche animale et proposent que les moyens soient plutôt alloués aux méthodes basées sur l’homme, bien plus à même de fournir des données pertinentes.
Antidote Europe écrivait, dès le 3 octobre 2016, à Mme Laurence Tiennot-Herment, présidente de l’AFM-Téléthon. Sans réponse de sa part plus d’un mois après, nous lui avons envoyé un autre courrier la prévenant que nous allions publier notre lettre, avec les interrogations qu’elle contient. Et c’est ce que nous faisons ci-dessous.
Téléthon : notre courrier du 7 novembre 2016
Madame,
Je vous contacte à nouveau au nom d’Antidote Europe, un comité scientifique qui œuvre pour une meilleure prévention en matière de santé humaine et pour une recherche biomédicale fiable, non basée sur l’expérimentation animale.
N’ayant, à ce jour, reçu aucune réponse de votre part à ma lettre du 3 octobre 2016 envoyée par courrier recommandé avec accusé de réception, je souhaite vous informer que ce courrier sera prochainement diffusé sous forme de « lettre ouverte » afin que les donateurs potentiels soient mieux informés quant à l’utilisation de leurs dons.
Cordialement,
André Ménache
directeur d’Antidote Europe
Téléthon : notre courrier du 3 octobre 2016
Madame,
Je vous contacte au nom d’Antidote Europe, un comité scientifique qui œuvre pour une meilleure prévention en matière de santé humaine et une recherche biomédicale fiable, non basée sur l’expérimentation animale.
Vu la mobilisation importante du grand public pour le Téléthon de l’AFM, il vous incombe de veiller à ce que les recherches subventionnées par les dons publics tiennent compte des connaissances les plus récentes mais également qu’elles se basent sur les preuves scientifiques les plus rigoureuses (en anglais « evidence-based medicine »).
Selon nos recherches dans la littérature scientifique, il s’avère que l’AFM subventionne des études précliniques sur des animaux (principalement des chiens de race Golden Retriever) dans le but de développer de nouveaux traitements pour les myopathies chez l’homme. Ci-dessous quelques exemples d’études subventionnées par l’AFM :
1. Une étude menée en 2014 utilisant 18 chiots de race Golden Retriever était censée démontrer le manque de toxicité d’un traitement en thérapie génique. Les chiots ont été suivis pendant trois mois et demi et tous ont été ensuite euthanasiés à l’exception de trois, euthanasiés bien avant la fin de l’étude pour des raisons de santé (non liées au traitement selon les auteurs) (1).
2. Un traitement expérimental mené en 2012 utilisant 7 chiots de race Golden Retriever. Deux des chiots sont morts à l’âge de 6 mois à cause d’une pneumonie aigue. Deux autres chiots sont morts à l’âge de 9 mois à cause d’une hémorragie pulmonaire (liée aux effets secondaires du traitement selon les auteurs) (2).
3. Encore une étude menée en 2014 impliquant 61 chiots de race Golden Retriever pour évaluer la présence de biomarqueurs sanguins liés à la mobilité. L’étude se focalisait sur la perte progressive de la marche des chiots durant cette période. Les auteurs ont constaté qu’un tiers des chiots étaient fortement handicapés à l’âge de 6 mois (3).
Dans l’optique d’une meilleure transparence à l’égard du public, ne serait-il pas opportun de préciser les informations pertinentes suivantes sur votre site :
1. Quelle proportion (et donc quel montant) de votre budget est allouée aux expériences sur les animaux ?
2. Pouvez-vous préciser combien d’animaux (et quelles espèces) ont été utilisés dans la dernière décennie d’études subventionnées par l’AFM ?
3. Pouvez-vous fournir des preuves scientifiques (références bibliographiques) en quoi les études animales subventionnées par l’AFM sont prédictives pour la myopathie chez l’homme ?
4. Quelle est l’instance au sein de l’AFM, et sa composition, en charge d’approuver une subvention pour une étude animale ?
Dans l’attente de votre réponse,
Cordialement,
Dr med vet André Ménache
Directeur Antidote Europe
Références bibliographiques :
1. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4429735/
2. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC3504044/
3. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4213729/