Pas de souris au collège !
Après une interdiction fin 2014 et une autorisation en avril 2016, la dissection de souris au collège et au lycée vient à nouveau d’être interdite par décision de Madame Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
Ministère contre syndicat, c’est le premier qui remporte cette troisième manche sur la possibilité ou non de disséquer des souris au collège et au lycée. Antidote Europe félicite Madame Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’Education nationale, d’avoir rappelé : « Il n’est plus procédé à des dissections d’animaux morts élevés à seule fin d’expériences scientifiques ». Le 21 juillet 2016, le Bulletin officiel publiait le texte adressé par la ministre aux recteurs, inspecteurs et enseignants le 8 juillet dernier (http://www.education.gouv.fr/pid285/bulletin_officiel.html?cid_bo=104634).
La possibilité, pour les professeurs de Sciences de la vie et de la Terre (SVT), de proposer des dissections de souris aux collégiens et lycéens était, en quelque sorte, laissée à leur interprétation de la directive européenne 2010/63/UE relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques. Les programmes permettaient ces dissections mais tous les professeurs ne les faisaient pas pratiquer. C’était il y a quelques années.
Le 28 novembre 2014, Mme Vallaud-Belkacem signait une circulaire interdisant les dissections, au collège et lycée, d’animaux vertébrés sacrifiés spécialement dans ce but. Mais en avril 2016, suite à la pression d’un syndicat d’enseignants (SNES-FSU) invoquant une mauvaise interprétation de la directive 2010/63, le Conseil d’Etat cassait cette décision ministérielle. C’est donc pour la deuxième fois que la ministre envoie une lettre aux enseignants, rappelant que les dissections d’animaux élevés à des fins de consommation alimentaire sont permises mais pas celles d’animaux élevés à la seule fin d’expériences scientifiques. Ce qui exclut les souris.
De meilleures méthodes
Antidote Europe n’est pas une association de défense animale et nous laissons à celles-ci le soin d’exposer des arguments éthiques contre l’utilisation de souris ou autres animaux dans l’enseignement de la biologie et de la médecine. En tant que scientifiques, nous avons d’autres arguments. Ils vont dans le même sens.
D’abord, en tant qu’anciens élèves de biologie, nous nous rappelons que les dissections ou autres expériences sur des animaux n’étaient pas présentées comme spécifiques à l’espèce animale utilisée. Un tel cours de biologie peut laisser penser à l’élève que les résultats obtenus ou que les observations faites sont valables quelle que soit l’espèce animale. Certes, on ne peut confondre l’anatomie de la souris avec celle de l’homme mais il ne nous semble pas correct de laisser croire que les données apprises « sur le vivant » s’appliquent à n’importe quel vivant.
Ensuite, en tant que scientifiques bien informés des méthodes de recherche actuelles, il nous semble déplorable que les enseignants continuent à utiliser les méthodes les plus archaïques. Pour l’élève qui se destine à des études de biologie et à une carrière de chercheur, quelle sera sa surprise lorsqu’il découvrira qu’il existe toutes sortes de méthodes pour étudier l’être humain de façon pertinente, que les données obtenues sur des animaux ne fournissent que des approximations qui peuvent mettre en danger des vies humaines. Un tel décalage entre les méthodes modernes d’exploration du corps humain -dont les professeurs pourraient présenter des images fort impressionnantes- et les tâtonnements au scalpel sur des animaux décongelés n’est-il pas de nature à inspirer la méfiance envers les leçons apprises d’une si imprécise manière ? L’utilisation de modélisations informatiques, par exemple, pourrait au contraire familiariser les étudiants avec certains des outils auxquels ils devront se former plus tard.
Enfin, attachés au « poids des preuves », concept scientifique et médical bien établi, il nous semble plus raisonnable d’utiliser les méthodes d’enseignement qui donnent les meilleurs résultats. Or, que ce soit en biologie -et c’est déjà très vaste !-, en médecine humaine ou en médecine vétérinaire, des études ont montré que les méthodes d’enseignement sans recours aux dissections ou expérimentations animales permettaient une meilleure acquisition des connaissances et un meilleur développement des aptitudes techniques. Nous évoquons ce sujet dans notre dossier https://antidote-europe.eu/methodes-alternatives-recherche-animale/enseignement-biologie-medecine/.
Espérons que cette fois soit la bonne et que les collégiens et lycéens reçoivent désormais un enseignement capable de les préparer au mieux aux professions qu’ils auront à exercer plus tard.